Bonjour Elis, peux –tu nous raconter ton parcours ?

Je n’ai pas toujours été illustratrice. Avant, j’ai travaillé dans un théâtre à Villejuif où j’étais chargée des relations avec le public et de l’éducation artistique. Pendant 4 ans, j’ai mis en lien les spectacles accueillis au théâtre avec le public c’est-à-dire les écoles, les hôpitaux, les prisons, les comités d’entreprise… Souvent, j’organisais dans les classes ou ailleurs, la venue des artistes et des ateliers.
J’étais entre création et transmission.
J’ai un parcours un peu classique : j’ai fait sciences politiques, un peu de lettres et en parallèle, je faisais de la photographie, du théâtre… J’ai commencé à peindre et à reprendre le dessin que j’avais arrêté au collège. Un jour, j’ai décidé de reprendre des études d’illustration. Je suis partie en Italie puis à l’Académie des Beaux-arts de Bruxelles dans un atelier d’illustration. Je me suis formée aussi à la transmission en passant l’équivalent d’un CAPES en arts-plastiques. Finalement, j’ai fait ma place dans le milieu de l’illustration en travaillant autour des albums jeunesse, des magazines, des affiches, des compagnies de spectacle…
J’aime bien diversifier. C’est pour ça que maintenant, je réalise aussi des performances à partir de mes livres pour aller vers le spectacle qui était un de mes premiers amours. Cela me permet de m’associer à d’autres artistes, des musiciens… c’est quelque-chose qui m’intéresse pour le futur.

Est-ce qu’il y a des artistes qui ont marqué ton parcours ?

D’abord c’était le cinéma, John Cassavetes , cinéaste américain que j’ai adoré lorsque j’avais 20 ans. Il y a aussi les photographes, j’aime le travail autour du flou, du mouvement. En livres jeunesse, j’ai été marquée par les albums d’artistes assez graphiques comme Pacovska qui fait partie de mes références et de mon inspiration, Hervé Tullet qui propose de sortir du livre en faisant des expositions au MOMA. J’aime le travail autour de l’abstraction de la spontanéité et tout particulièrement le travail des artistes de l’Art Brut. J’aime beaucoup les dessins d’enfants que je trouve inspirants.
En somme, des références très différentes ; du plus classique figuratif au plus abstrait et étrange.
Sinon, en livres jeunesse, j’aime bien le travail de Loren Capelli qui fait un dessin très contemporain que j’adore et l’humour de Benoit Jacques.

Quelles sont les techniques que tu utilises le plus souvent ?

Lorsque je travaille pour les livres, je travaille avec des collections de dessins et j’écris un story bord. Pour l’album « Maman », c’est un travail à l’aquarelle et au crayon à papier. J’aime bien le côté flou, un peu poétique de l’aquarelle et le côté plus précis du crayon de papier. Après, je créé les illustrations sur mon ordinateur. Ҫa me permet de faire comme du collage numérique. Je peux jouer avec mes dessins, les agrandir par exemple. Dans l’album « Mon ours » j’ai agrandi les dessins en aquarelle et j’ai joué avec la texture du papier.
Parfois, c’est du collage avec des photos et des fonds d’aquarelle que je fusionne. Le hasard a sa
place dans mon travail. J’aime bien créer mes images en m’amusant et les modifier à l’infini.

En arts-plastiques, je travaille beaucoup de techniques que je mélange. Ce sont des couches de
matière qui se rencontrent, ça se construit au fur et à mesure que je dessine avec la matière. Ce
travail sera exposé en tant qu’original ce qui n’est pas le cas pour le travail d’illustration destiné à
être imprimé.

Que t’apportent les enfants lorsque tu travailles avec eux ?

À chaque fois que je fais une dédicace pour une classe, j’utilise la technique que je leur demanderai
d’utiliser ensuite. Ҫa peut être du feutre, des fluos, ça peut être à partir de photos qu’ils continuent
où qu’ils intègrent à leur dessin en utilisant les feutres. Chaque fois, ils me disent toujours que je dessine bien mais moi je trouve qu’ils ont une capacité à rendre vivants leurs dessins. Ils y mettent leur énergie, leur créativité et je trouve que les dessins d’enfants sont des endroits de liberté et d’expressivité incroyables.
A chaque fois, je suis fascinée par le mélange des couleurs, la liberté, l’originalité. Je trouve que c’est très fort pour peu qu’on leur donne la possibilité de créer dans un cadre. Les artistes peuvent ouvrir et permettre à chacun de développer sa créativité.

Quel serait le conseil que tu aimerais donner aux enfants que tu rencontres ?

La curiosité est un bon moteur pour se nourrir, découvrir d’autres artistes et petit à petit se
construire des références. Après, le dessin, ça s’apprend, ça se travaille pour s’approprier les codes.
Ensuite, ça se désapprend pour aller vers un style plus personnel. Par exemple, Picasso comme
d’autres a désappris pour trouver une façon de dessiner nouvelle ;
Oui, il faut être curieux.

Elis Wilk nous a fait le plaisir de participer au salon du livre à plusieurs reprises, elle a rencontré de
nombreuses classes en Tarn et Garonne. Son album « L’appel de la lune » a fait partie de la
sélection du prix littéraire « Graines de lecteurs » en 2018.
En 2021, lors de sa résidence d’artiste, elle a réalisé des ateliers dans plusieurs écoles du
département.